Mapuche-hommes de la terre
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21 janvier 2008
LETTRE A MADAME BACHELET, PRESIDENTE DU CHILI.
Barbara Moreau
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Kikébab
BP 13
89110 Aillant sur Tholon
[email protected]

Madame la Présidente,

Patricia Troncoso vous a écrit récemment et vous a demandé ce que vous ressentiez lorsqu’une personne jeûnait depuis 70 jours. Aujourd’hui, Patricia a nettement dépassé le stade critique et un retour à la vie n’est plus possible. Elle poursuit une grève de la faim de plus de 100 jours, la plus longue de l’histoire du Chili, une des plus longues de l’Histoire tout court. Je n’ai pas trouvé de cas ayant franchi le cap des 90 jours. Je ne dis pas cela pour ajouter un détail piquant pour un imaginaire avide de sordide ni pour faire état d’un record. Je vous dis cela car cette femme, en plus de la légitimité de son combat est en train de forcer votre admiration et la nôtre. Cela ne devait pas être prévu au programme.

Je vous dis cela pour que vous sachiez que nous savons. Je vous dis cela pour que vous sachiez que la France vous regarde et qu’elle vous regarde tous les jours, depuis plus de 100 jours. Je vous dis cela pour que vous sachiez que la France va se servir de ce triste record pour vous regarder d’encore plus près.

La France vous a accueillis en 1973, vous, les démocrates chiliens et la France veut savoir ce que vous avez fait de votre rêve de démocratie.

Après 1973, Francesca Solleville a chanté « Camarade Chili ». A Auxerre, dans ma petite ville du centre de la France, nous avions reçu Philippe Rieu et Annie Nobel. Je ne suis pas bien sûre des noms mais des paroles de cette chanson, si!

« Nous irons un jour à Valpareiso Feras-tu la route avec moi?

La mer est mauvaise, on ne nous attend pas.

Il est mort, le Cavallero »

Madame la Présidente, je n’ai jamais mis les pieds au Chili et je n’ai aucun lien familial avec votre pays. Je ne parle même pas l’espagnol!

C’est la voix d’une petite fille de douze ans que vous entendez ici. Une petite fille qui apprit par votre exemple ce que l’on peut faire aux rêves de démocratie.

Madame la Présidente, qu’avez-vous fait de nous qui vous aimions tant ? Qu’avez-vous fait de notre indignation devant votre peuple massacré ? Qu’avez-vous fait de ce Caballero dont vous héritez en quelque sorte?

Vous préférez livrer votre pays aux riches. Vous préférez sacrifier encore et encore le peuple mapuche. Vous préférez vous conduire en colon dans votre propre pays. Quelle image nous offrez-vous ? Quelle image allons-nous garder de cette autre dame de fer?

Madame la Présidente, encore une fois, je vous demande, je vous supplie de ne pas trahir l’espoir que nous avions placé en vous.

Madame la Présidente, je ne connais pas tous les enjeux de votre dilemme. Je sais seulement que l’Histoire ne retient que deux choses : les bains de sang et les Cavalleiro. Choisissez votre souvenir.

Je vous laisse sur cette pensée : « Soyez réalistes : demandez l’impossible » : Ernesto Guevara.

Je vous prie d’agrer , Madame la Présidente, l’expression de mes respectueuses salutations.

Barbara Moreau / Kikébab

«Reproduction autorisée à condition de citer la source.»